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Rédigée dans le cadre de ma scolarité à l'INSA, cette page est le fruit de ma réflexion sur le mariage chrétien et ne cherche en aucun cas à porter atteinte aux convictions du lecteur.
L'amour tant recherché de nos jours est vécu tellement différemment par chacun qu'il m'a semblé important de prendre un temps de réflexion sur notre perception du mariage. Avec un taux de divorce important et fréquemment rappelé par ses détracteurs, cette institution perdrait-elle pied ? Quel est le sens du mariage ? Qu'en est-il du mariage chrétien ? Ces questions nécessitent dans un premier temps de faire un bilan sur la perception du mariage et de l'amour par notre société. Ensuite une explication de ce qu'est le mariage chrétien permettra d'ouvrir sur une réflexion plus personnelle sur l'engagement du mariage.
État des lieux
"Longtemps le mariage a trouvé sa justification dans des fonctions sociales [...]. Toutes ces fonctions semblent aujourd'hui facultatives en ce sens que, au moins partiellement, elles peuvent être remplies hors du mariage."
constate Xavier Lacroix dans Les mirages de l'amour 1. Le taux de divorce de 40% ces dernières années n'indiquerait-il pas un problème dans notre conception du mariage ? Pourquoi tant de couples vivent en concubinage, parfois pendant plusieurs dizaines d'années ? Pour éclaircir cette situation nous étudierons d'abord l'effet des mythes sur la perception de l'amour. Ensuite nous chercherons pourquoi le concubinage devient de plus en plus fréquent.
Le mythe de l'Amour
Souvent, le couple est représenté par deux moitiés et nombreuses sont ceux à la recherche de leur "moitié". Cette notion remontant aux androgynes a une influence sur notre représentation de l'amour. Avant de poursuivre il faut noter que les androgynes sont de puissantes créatures sphériques composées de deux sexes. Ayant irrité les Dieux elles se virent sectionnées en deux parties de sexes désireuses de fusionner. Comme Xavier Lacroix le souligne 1, ce mythe ne subsiste pas tant dans son idée de fusion que sous la forme notamment de l'ajustement parfait. Il en reste aujourd'hui cette illusion qu'il suffit de trouver celui ou celle qui nous convient exactement. Celle-ci met aussi en valeur les déceptions et les différences que nous croyions évitées : nombreux sont ceux attendant encore leur "prince charmant". Ce-dernier nous fait retrouver aussi les contes de notre enfance nous influençant, si l'on en croit Bruno Betelheim. Par contre il est agréable de lire des albums pour enfants comme Pauvre Verdurette 2 concluant par "On n'embrasse plus les grenouilles de nos jours". Loin d'être majoritaires, ces conclusions laissent encore place dans notre imagination au célèbre "Ils se marièrent et eurent beaucoup d'enfants". Adaptés en dessins animés ces contes marquent encore les esprits : le prince charmant a encore de beaux jours devant lui !
Le dernier mythe auquel nous nous arrêterons est celui de Tristan et Iseut. Xavier Lacroix s'attache à l'expliquer sur des propos de Denis de Rougemonti 3. La notion de coup de foudre, l'amour de l'amour, le rôle de l'interdit et le caractère antisocial que certains prêtent à l'amour sont en effet initiés dans cette histoire du moyen-àge. Comme le prince charmant, le coup de foudre est-il une valeur sûre pour un couple ? Reprennons le schéma des étapes de l'amour que Denis Sonet présente dans la plupart de ses ouvrages 4. Le coup de foudre serait un instant d'illusion transportant les amoureux en téléphérique (1). Lorsque ceux-ci se rendent compte des défauts et différences de l'autre, c'est la chute dans un tunnel (2). Après une aussi dure épreuve, plusieurs choix s'offrent à eux :
- revenir au point de départ par les sentiers de montagne (3a)
- adopter une attitude passive comme l'attente sur le parking (3b)
- décider de continuer avec leurs différences et franchir le pont du mariage (3c).
Après avoir franchi le pont commence l'ascension à deux de la montagne de la vie (4). C'est dans la première étape d'idéalisation que le proverbe "l'amour rend aveugle" prend son sens. La durée de cet instant idyllique varie suivant les couples. De nombreux ouvrages s'accordent à dire qu'il est bon et moteur dans un premier temps, mais ne doit pas perdurer. Les plus jeunes d'entre nous découvrirons le coup de foudre dans des romans comme Le prince de sang melé5, sixième volume de la série de Harry Potter. L'auteur le représente sous la forme d'une potion déconseillée par les professeurs.
Pour Xavier Lacroix et Tony Anatrella 6, notre société a une vision "adolescentrique" de l'amour. Cela correspond à un amour cherchant à s'inscrire en dehors des institutions, un amour intimiste. Nombreux sont ceux qui n'invitent personne à leur mariage, non dans un soucis d'économie, mais parce que "cela ne regarde que nous". Un tel amour pourra-t-il s'inscrire dans la durée d'une vie ? Résistera-t-il aux aléas de la vie ? Est-il possible de ne bàtir un couple que sur l'amour ? Toutes ces questions semblent trouver leur réponse dans la définition du problème : Il est aisé de constater qu'un couple d'adolescent ne dure pas. Sa différence principale avec un couple adulte reste l'enjeu qu'une séparation représente.
Le concubinage
Après avoir vu les différentes sources d'influence de notre perception de l'amour et donc du mariage, il est important de constater l'augmentation du concubinage ces dernières années. En étudiant ce phénomène et ces raisons, nous pourrons compléter le bilan commencé sur le rapport de notre société avec le mariage et l'amour.
- Définition – Pour Paul et Mary, le mariage est un engagement, affectif, spirituel et social. Par ce contrat ils s'engagent à vivre ensemble pendant un temps donné, à approfondir leur union, à partager leur amour et leurs expériences.
- Durée du contrat – Ce contrat est d'une durée de cinq ans. A la fin de la période, il pourra expirer ou être renouvelé. Ses termes pourront en être renégociés.
- Signature du contrat – Ce contrat sera signé le jour qui semblera le plus commode aux deux parties. La signature ne sera accompagnée d'aucune cérémonie. Ceci étant une affaire privée, les parents ni les amis ne seront invités.
- Conditions de la vie commune – Paul et Mary habiteront ensemble. Ce qui n'exclu pas de vivre en communauté avec d'autres. Toutes les tàches de la maison seront partagées. (...). Paul s'occupera de la voiture de Mary. En échange, Mary fera la couture et le raccommodage pour Paul. (...)
- Fidélité – Les relations sexuelles de Paul et Mary ne seront pas exclusives. Celui qui choisit d'avoir des relations sexuelles avec une tierce personne n'est pas tenu d'en informer l'autre. Il est cependant jugé préférable de ne pas en faire un secret, afin de ne pas interrompre la communication entre Paul et Mary. Ceux-ci sont d'accord pour garder aux relations avec des tiers un caractère secondaire par rapport à la relation principale.
- Nom – Cette relation étant celle de deux individus autonomes, Paul et Mary ne souhaitent pas un nom qui transforme l'un des deux en un appendice de l'autre. Mary s'est battue suffisamment longtemps pour établir son identité. Elle refuse donc d'abandonner son nom et ne sera jamais présentée aux autres sous le nom de Mme Paul Smith
Extrait d'un contrat de mariage à l'américaine présenté par Jacques Salomé
Une raison importante du concubinage aux yeux de Alain Quilici et Denis La Balme dans Pourquoi se marier quand on vit ensemble? 7 est la durée des études et par là-même le long temps de dépendance financière. Pour eux, même ceux choisissant de s'insérer rapidement dans le monde du travail, touchés par le chômage, se trouvent longtemps dépendants financièrement de leurs parents et donc privilégient le concubinage avant le mariage. Il est vrai que bàtir un foyer dans ces conditions est difficile. Même si ce phénomène est fréquent, ces deux auteurs dénoncent surtout l'état d'esprit de nombreux concubins.
En matière de mariage , on veut un CDI en gardant la liberté d'un CDD. On veut bien que l'autre s'engage (l'employeur, l'assureur, le conjoint), mais soi-même, on veut pouvoir se retirer du contrat sans préavis. 7
Cette vision du mariage et du couple très individualisme, selon Alain Quilici et Denis La Balme, vient du fait que nous avons une mauvaise définition de la liberté. Pour eux, beaucoup conçoivent la liberté comme les adolescents : "faire ce qui me plais quand je le veux". Ceci conduit aussi à des mariages-contrats comme le montre Jacques Salomé 8. Cette approche mène les deux époux à définir les limites de leur droits et devoirs de conjoints de façon plus ou moins formelle. La rédaction de contrats comme celui de l'encadré ci-contre reste pourtant une pratique peu courante en Europe alors qu'elle l'est depuis déjà quelques dizaines d'années outre-Atlantique.
Le contrat présenté ici dans une version simplifiée, présente bien des symptômes d'un individualisme détruisant par là-même la notion de mariage. En effet, loin d'être une juxtaposition de deux individus autonomes comme le présente ce contrat, le mariage est une communion entre deux personnes. De nombreux auteurs sur le thème de l'amour présentent cette juxtaposition comme une dérive du mariage au même titre qu'une fusion comme celle des androgynes.
Un mal d'amour
Le point commun entre tous les "mythes" que nous venons de parcourir est, au fond, de nier la difficulté de la rencontre, que ce soit au profit de la totalité, de la fatalité ou encore de l'immédiateté, du conformisme, de la magie. Toujours difficile sera la rencontre réelle de l'homme et de la femme. 1
Cette conclusion de Xavier Lacroix, complétée d'un constat sur le concubinage assez sévère, montre notre société souffrant d'un mal d'amour certain. Celui-ci serait évidemment une des causes d'une perte de sens du mariage chrétien aujourd'hui. Cependant de nombreux auteurs sont capables d'écrire sur ce mal d'amour : une partie de la société est donc consciente de ce malaise. Comme nous le verrons par la suite, le sens du mariage n'est pas perdu pour autant.
Mariage chrétien ?
"Ce qui est rejeté aujourd'hui, n'est-ce pas surtout une caricature du mariage ?" demande Denis Sonet dans Découvrons L'amour 9. Cette question nous amène a réfléchir plus précisément sur ce mariage que nous connaissons mal. Le mariage chrétien possède deux dimensions importantes : c'est avant tout un engagement social comme le mariage civil. Mais il est surtout l'alliance entre un homme et une femme désireux de vivre en communion à l'image de Dieu et avec Dieu.
Acte social
- Art. 212 – Les époux se doivent mutuellement fidélité, secours, assistance.
- Art. 213 – :Les époux assurent ensemble la direction morale et matérielle de la famille. Ils pourvoient à l'éducation des enfants et préparent leur avenir.
- Art. 215 – :Les époux s'obligent mutuellement à une communauté de vie. La résidence de la famille est un lieu qu'ils choisissent d'un commun accord.
Extrait du code civil
- Avant d'essayer de comprendre les spécificités du mariage chrétien, il
- faut voir qu'il est un acte social au même titre que le mariage civil.
- En effet, il est la volonté d'un homme et d'une femme de fonder un foyer
- une petite cellule de société. Même si des concubins peuvent vivre leur amour dans cet optique d'intégration dans la société, le mariage reste une institution privilégiée par bien des aspects.
D'un point de vue juridique, le couple marié représente une entité dans laquelle chacun à droits et des devoirs, comme le montre cet extrait du code civil. Comme le fait remarquer Xavier Lacroix dans Le mariage... tout simplement, la loi organise la séparation des couples mariés alors qu'elle ne le fait pas pour les concubins. C'est ainsi que certains concubins peuvent se retrouver dans des situations très difficiles. Par exemple, l'auteur cite un témoignage paru dans la presse d'une femme qui s'est retrouvée à la porte de chez elle avec son enfant sans rien pouvoir faire. Ceci ne pourrait pas arriver pour un couple marié dans lequel "les époux se doivent mutuellement secours et assistance".
De plus le mariage permet aux époux d'accéder à certains avantages pour des assurances, caisses de retraites et autres organismes sociaux, et donne aussi droit à la nationalité française si l'un des époux est étranger. Ceci pose le problème des mariages blancs. En effet, pour être valide un mariage doit respecter certaines règles: qu'il n'y ait pas d'empêchements. Afin d'éviter les "mariage-nationalisation", l'État français demande une preuve de vie commune supérieure à 4 ans si l'un des époux est étranger 10. Cette notion d'empêchement instituée par l'Église catholique au XIIème siècle a évolué avec le temps et été reprise dans le droit français.
L'histoire de l'institution du mariage montre aussi que l'aspect religieux et l'aspect social ont toujours été associés. En effet, le mariage civil ne date que de la révolution française et a été inspiré de son prédécesseur : le mariage chrétien. Actuellement, la loi française impose la célébration du mariage civil avant le mariage religieux. Même si le mariage chrétien est aussi un acte social nous verrons qu'il est bien plus : il tient ses fondements au sein même de la Bible.
Image de Dieu
Dans l'esprit de ceux ne le connaissant pas bien, le mariage chrétien n'est qu'une contrainte supplémentaire pour le couple, un ensemble de valeurs morales plus ou moins dépassées. Ce discours est en partie vrai puisque le catéchisme sur le mariage date de St Thomas d'Aquin (XIIIème siècle).
"la pensée de l'Église s'est limitée à une théologie du mariage qui relevait davantage d'une philosophie naturelle que d'une réelle réflexion théologique" 11
Comme cette phrase d'Yves Semen le souligne, la pensée de l'Église sur le mariage mérite d'être revue. St Thomas d'Aquin s'est en effet arrêté au sacrement du mariage dans sa Somme théologique. Poursuivie par son secrétaire à l'aide de textes plus anciens, cette partie du catéchisme de l'Église catholique n'a pas été revue avant Jean-Paul II. Cette dernière réflexion reste encore peu connue, parce que le pape avait décidé de la diffuser au travers d'audiences générales chaque mercredis entre 1979 et 1984 pour éviter l'acharnement médiatique. Depuis, découverte et mise à la portée de tous, cette "théologie du corps" nous montre le mariage sous un jour nouveau. Nous verrons dans un premier temps la dimension de l'amour dans mariage chrétien. Ensuite, nous essaierons de comprendre pourquoi Jean-Paul II disait que le mariage est le sacrement primordial.
Couple pour aimer
Même s'il est évident que le couple est le premier lieu de l'amour, celui-ci prend une dimension toute autre dans le mariage chrétien. L'un des mystères fondamentaux de la foi chrétienne se retrouve dans le mariage : la nature trinitaire de Dieu. Pour les chrétiens, Dieu est à la foi une personne et la communion de trois : le Père, le Fils et l'Esprit-Saint. Comment ce mystère pourrait donc être relié au mariage ? Avec Jean-Paul II, nous relirons le récit de la Création pour comprendre cet autre mystère.
20L'homme appela de leur nom tous les bestiaux, les oiseaux du ciel et toutes le bêtes des champs; mais pour l'homme il ne trouva pas d'aide qui lui fût assortie. 21 Alors Yahvé Dieu fit tomber une torpeur sur l'homme, qui s'endormit. Il prit une de ses côtes et referma la chair à sa place. 22 Yahvé Dieu bàtit en femme la côte qu'il avait prise de l'homme, et il l'amena à l'homme. 23 L'homme dit :"Celle-ci, cette fois, est l'os de mes os et la chair de ma chair; celle-ci sera appelée femme, car c'est d'un homme qu'elle a été prise, celle-ci !" 24 C'est pourquoi l'homme quitte son père et sa mère et s'attache à sa femme, et ils deviennent une seule chair. 25 Or tous deux étaient nus, l'homme et sa femme, et ils n'en avaient pas honte.
Gn 2, 20 - 25
Fondement théologique du mariage ce texte du livre de la Genèse, expliqué par Jean-Paul II prend une toute autre forme. Dans la traduction française de ce texte, la signification des mots "homme" et "femme" varie selon les passages rendant ainsi la lecture difficile. Jean-Paul II retient plusieurs points dont le besoin de l'homme en général de se donner à un égal. Tirée de l'humanité, c'est la femme cet égal. Ce texte montre ce plan de Dieu sur l'homme et la femme de ne faire qu'une seule chair, c'est-à-dire une seule personnalité. Ce terme, bien qu'un peu fort, nous montre que dans le mariage chrétien nous sommes appelés à être en communion l'un avec l'autre, de la même façon que les personnes divines sont en communion. Nous devons cette vision du mariage à Jean-Paul II, car auparavant le mariage était la symbolisation de l'amour de Dieu pour l'humanité. Bien que nouvelle, elle n'est nullement contradictoire avec cette symbolique de l'agapè (l'amour divin) soulignée dans de nombreux textes bibliques comme le livre d'Osée, les noces de Cana ou le récit de la dernière cène.
Ce texte est précédé d'un autre récit de la création dans lequel Dieu
envoie l'homme et la femme avec pour mission d'être féconds. Cette
fécondité à laquelle nous sommes appelés, passe évidemment par le don de
la vie, mais elle peut être de différent ordre. Xavier Lacroix relève
trois autres types de fécondités : interpersonnelle, sociale et
spirituelle. En effet, être fécond c'est porter du fruit, cela peut donc
prendre diverses formes : par exemple donner de son temps à une
association, aider d'autres personnes ou juste être la preuve que le
mariage est possible.
Nous comprendrons bien après ces explications que le mariage chrétien
nous appelle à un amour différent, pour nous rapprocher de Dieu.
Cependant, pour les chrétiens le mariage est aussi un sacrement. Nous
verrons dans la suite ce qu'est un sacrement, en quoi le mariage en est
un et pourquoi Jean-Paul II disait que c'était le sacrement primordial.
Le sacrement primordial
Il est assez rapide de constater que pour certains, le mariage "à l'église" est avant tout un instant magique pratique pour faire de belles photos. Ne s'en tenir qu'à cette vision restreinte du mariage chrétien serait fort dommageable : c'est pourquoi l'Église catholique invite les futurs époux à participer à un groupe de réflexion sur le mariage. Nous allons essayer d'aborder la question ici pour mieux voir le sens du mariage chrétien.
1Le troisième jour, il y eut des noces à Cana de Galilée, et la mère de Jésus y était. 2Jésus aussi fut invité à ces noces, ainsi que ses disciples. 3 Et ils n'avaient pas de vin, car le vin des noces était épuisé. La mère de Jésus lui dit "Ils n'ont plus de vin." 4Jésus lui dit : "Que me veux-tu femme ? Mon heure n'est pas encore arrivée." 5Sa mère dit aux servants : "Tout ce qu'il vous dira faites-le."
6Or il y avait là six jarres de pierre, destinées aux purifications des Juifs, et contenant chacune deux ou trois mesures. 7Jésus leur dit : "Remplissez d'eau ces jarres." Ils les remplirent jusqu'au bord. 8Il leur dit : "Puisez maintenant et portez-en au maître du repas." Ils lui en portèrent. 9Lorsque le maître du repas eut goûté l'eau devenue vin. Il ne savait pas d'où il venait, tandis que les servants, eux le savaient, eux qui avaient puisé l'eau. Alors le maître du repas appelle le marié 10 et lui dit : "Tout homme sert d'abord le bon vin, et quand les gens sont ivres, le moins bon. Toi, tu as gardé le bon vin jusqu'à présent ?" 11Cela, Jésus en fit le commencement des signes, à Cana de Galilée et il manifesta sa gloire et ses disciples crurent en lui.
Jn 2, 1-11
La première chose à rappeler, c'est la notion de "sacrement". Ce mot, certes démodé, possède un sens particulier pour les chrétiens : un sacrement est un signe efficace de Dieu. La définition "officielle" des sacrements pour l'Église catholique nous aide à mieux intégrer cette notion :
Les sacrements de la Loi Nouvelle sont institués par le Christ et ils sont au nombre de sept, à savoir le Baptême, la Confirmation, l'Eucharistie, la Pénitence, l'Onction des malades, l'Ordre et le Mariage. Les sept sacrements touchent toutes les étapes et tous les moments importants de la vie du chrétien : ils donnent naissance et croissance, guérison et mission à la vie de foi des chrétiens. En cela il existe une certaine ressemblance entre les étapes de la vie naturelle et les étapes de la vie spirituelle (cf. St Thomas d'Aquin, somme théologique 3, 65, 1). 12
Cette définition est en réalité un peu trop simple : Wikipedia nous explique en plus que les sacrements ne sont pas seulement des symboles, mais des gràces que Dieu accorde. Le sacrement du mariage se réfère au signe de Jésus lors des noces de Cana. En effet, que Jésus inaugure sa vie publique par un signe dans un mariage n'est pas anodin. Le changement de l'eau en bon vin est le symbole de la gràce que Dieu accorde aux époux. Jésus parle aussi de "son heure" dans ce texte : cela nous montre que le mariage chrétien comporte de nombreuses similarités avec les noces de Dieu avec l'humanité. Ce thème revient souvent dans les Écritures et dans le rituel du mariage : les alliances des mariés sont le signe de l'Alliance de Dieu avec les Hommes.
Avec ce fort appel à s'aimer comme Dieu nous aime, à être signes de l'Alliance de Dieu avec les hommes, nous avons devant nous un chemin de sainteté. C'est pour cela que Jean-Paul II disait du mariage qu'il est le sacrement primordial : c'est celui qui va le plus montrer l'amour de Dieu aux autres.
Quel mariage aujourd'hui ?
Ce que nous avons vu peut sembler naturel pour certains, mais beaucoup ne partagent pas ces valeurs. J'exposerai dans un premier temps quelques visions du mariage qui m'ont choqué, puis j'expliquerai en quoi le mariage chrétien prend tout son sens de nos jours. Cette partie sera ma conclusion mais reste ouverte à d'autres réflexions.
Visions du mariage
Je présenterai ici quelques visions du mariage qui m'ont marqué et qui se retrouvent chez beaucoup de couples. Il y a des couples heureux qui durent dans le mariage et c'est tant mieux. Nous tirerons néanmoins quelques leçons de ces points de vues peu exemplaires.
La peur de l'engagement
J'ai rencontré il y a quelques temps un couple vivant ensemble depuis plusieurs années avec un enfant en bas àge. Leur ayant demandé s'ils envisageaient le mariage, l'un des concubins a montré son opposition. Pour la plupart des personnes qu'il connaît le mariage a entraîné une rupture. Ce cas, est à mon avis fréquent et régulièrement soulevé par les spécialistes du mariage comme le CLER. Cette réaction dénote d'une peur certaine de s'engager à vie avec l'autre. En effet, ces couples ont l'impression que l'autre se laissera aller une fois le mariage passé. Denis Sonet parle alors de "mariage-assurance". Les époux y voient le ciment de leur union, ce qui va la rendre éternelle. Cette perception, peut être causée par deux éléments différents : un problème enfoui ou un manque de confiance.
Dans le cas d'un problème de relation au sein du couple, masqué dans la relation de concubinage par une peur de la réaction de l'autre le problème n'apparaît pas clairement mais les concubins le sentent respectivement selon des degrés parfois variables. Se marier dans ce type de situation enlèverait tout ce qui masque le problème : le mariage devient en quelque sorte une assurance que l'autre ne partira pas et le problème enterré peut ressurgir. En ce sens il est vrai que le mariage ne fait pas le "bonheur" du couple, mais est-ce que vivre en dissimulant le même problème est forcément mieux ? Qui garanti que la situation ne se compliquera pas par la suite ? Ce qui m'effraie dans ce genre de cas, c'est la vulnérabilité de la relation : la remontée d'un problème enfoui doit s'effectuer le plus tôt possible pour éviter trop de dégàts.
Dans le second cas, le malaise vient que nous aimons être sûrs de ne pas nous tromper dans nos choix. Il en va de même pour le mariage, alors placé au sommet d'une échelle de choix à ne pas rater dans la vie. L'un ou les deux dans le couple se demande s'ils sont dignes de ce défi, s'ils pourront le relever. Relevant d'un manque de connaissance de soi ou d'un esprit trop sécuritaire (dans le sens d'avoir un filet de sécurité), ce point de vue fera piétiner le couple en l'empêchant de mûrir. Comme le rappellent de nombreux spécialistes, le mariage est une aventure dont chaque conjoint est acteur.
Trois contre-exemples
Le film "Mariages!" réalisé par Valérie Guignabodet présente aussi trois couples de différents àges qui nous sont familiers. Les jeunes mariés, ceux qui le sont depuis déjà 10 ans et les autres qui se sont déchirés 10 ans auparavant et essaient de se réconcilier. Ils nous sont familier parce qu'ils sont issus de notre entourage et reflètent très souvent des couples que nous connaissons mieux.
Quoiqu'on en dise, les pressions familiales, sociales, psychologiques existent toujours et il y a toujours autant de mauvaises raisons de vouloir se marier. Et quand on se marie pour de mauvaises raisons, le contrat se transforme vite en contrainte. Et c'est ainsi que Ben et Johanna, s'ils ne font rien, se retrouveront dans dix ans dans le même état que Valentine et Alex, qui eux mêmes finiront probablement comme Micky et Hugo : ces trois couples sont en fait le même couple, marié trop tôt sans trop savoir pourquoi, et exploré à trois moments fatidiques de son existence de couple. Mais peut-être les 24 heures de cette histoire leur feront gagner 10 ans de réfléxion ? 13
Comme le souligne la réalisatrice du film, le mariage est bon uniquement si le couple connaît la voie sur laquel il s'engage. Cependant beaucoup de couples mariés le remettent en question après quelques années. J'aime beaucoup l'adage chrétien "tous les jours, il faut renouveller le oui du mariage". C'est une façon de dire qu'il ne faut pas l'oublier mais l'entretenir régulièrement. Sans cela, les époux vont chercher leur bonheur ailleurs dans le travail, des activités ou d'autres partenaires et diront qu'ils sont privés de liberté. Au contraire, comme nous l'avons vu, la liberté dans le mariage est une liberté à deux pour vivre de plus belles choses. D'ailleurs Alex le reconnaît à la fin du film, "La liberté tue les mauvais mariages mais nourrit les grandes amours".
Un mariage redoré
Comme le souligne le Pèlerin magazine dans son numéro de février 2006, le mariage si souvent décrié n'est pourtant pas abandonné. Le magazine note même l'apparition d'un nouveau métier d'organisateur de mariage et le nombre croissant de salons du mariage, signes d'un engouement nouveau pour l'institution. Dans ce même numéro est paru un sondage TNS-Sofres sur la perception du mariage par les français 14. Ce sondage montre que le mariage est perçu avant tout comme un engagement solennel vis-à-vis du conjoint. Le fait qu'il soit important pour avoir des enfants ou que ça soit un sacrement religieux vient en second lieu, loin derrière. Le dossier du Pèlerin souligne aussi qu'il n'y a plus d'opposition ideologique au mariage comme il y en avait dans les années 70 : c'est un frein en moins mais ne fait pas non plus remonter le nombre de mariage célébrés chaque année (de l'ordre de 400 000 en 1970 contre 250 000 maintenant).
Du côté du mariage chrétien, je trouve intéressant la démarche de l'Église depuis 1956 : les jeunes couples demandant le mariage peuvent participer à des groupes CPM (Centres de Préparation au Mariage). Ces groupes permettent aux couples demandant le mariage de mieux savoir ce qu'ils demandent. En ce sens, le mariage d'aujourd'hui a plus de sens que celui du début du XXème siècle. Alors que jusqu'après guerre, le mariage était souvent arrangé pour des intérêts familiaux, il est aujourd'hui désiré et voulu par les couples. Même si les pressions familiales sont toujours présentes, une majorité des couples s'engageant dans une demande du mariage chrétien le font pour "donner du sens à leur vie" : cet appel à la sainteté que nous avons déjà évoqué.
Conclusion
A mon avis, nous avons maintenant la chance de pouvoir vivre le mariage chrétien pour ce qu'il est vraiment : un sacrement. Même si beaucoup décrient le mariage ou le refusent par peur, il est néanmoins encore très présent dans notre société. Il a même été embelli avec des sentiments depuis 1968. Pour un chrétien, il reste à intérioriser le sens du mariage. Comme en témoignent beaucoup de prêtres, de nombreux couples non-chrétiens demandent aujourd'hui le mariage. C'est ainsi l'occasion de leur faire comprendre les valeurs humaines fondamentales du mariage. En effet les animateurs de groupes CPM doivent introduire ces valeurs sans nécessairement entrer en profondeur dans la théologie du corps et du mariage. Depuis quelques année, l'Église désire permettre aux personnes qui ne sont pas familières aux textes chrétiens d'en saisir la valeur et la profondeur. C'est un nouveau type d'évangélisation qui commence.
Lectures intéressantes
Pour ceux qui souhaitent approfondir leur connaissance du mariage et des fiançailles, cette partie vous indiquera quelques ouvrages intéressants qui ont servi à ma réflexion. Classés par ordre préférentiel de lecture, ils vous entraîneront depuis une découverte de l'Amour avec le CLER et le père Denis Sonet, jusqu'à une présentation simplifiée de la cathéchèse des mercredis de Jean-Paul II sur le sujet de la sexualité.
Tous ces livres, aussi intéressants les uns que les autres, apporteront néanmoins différents éléments de réponse à vos questions. Nous soulignerons qu'à la lecture de ces ouvrages, il n'est pas impossible que vous perceviez une évolution sur votre façon de vivre en couple ou en société.
Découvrons l'amour
- Auteur : Denis Sonet
- Résumé : Bon exposé des idées présentées par le CLER, cet ouvrage se veut à la portée de tous. Denis Sonet vous présentera les points importants dans l'amour ainsi que quelques écueils. Ce livre présente l'amour tel qu'il est dans notre société en restant très réaliste, et nous montre ce qu'il devrait être. Cette approche est basée sur du concret et donc facilement abordable pour des adolescents. Par son discours, l'auteur veut nous montrer de quel amour il est préférable de s'aimer et nous invite à nous poser les bonnes questions.
Les Fiançailles
- Auteur: Alain Quilici
- Sous-titre: Lecture spirituelle du temps des fiançailles à l'intention de ceux qui ont quelques exigences
- Résumé: Comme le sous-titre l'indique, Alain Quilici tient à rappeler dans cet ouvrage ce que sont les fiançailles. L'auteur rend son sens à ce terme trop souvent incompris au risque de choquer. Axé en quatre parties, ce livre vous permettra de découvrir ce qu'est ce temps avant le mariage, fourni quelques lectures clés de la Bible et propose quelques pistes pour bien vivre ses fiançailles et préparer son mariage. Vraiment destiné aux fiancés, cet ouvrage permet aussi de commencer à saisir la pensée de l'Église sur le mariage et la sexualité.
Le Mariage... tout simplement
- Auteur: Xavier Lacroix
- Résumé: Simple à comprendre pour un lecteur non-averti, ce livre décrit le mariage sous tous ses aspects. Xavier Lacroix montre l'évolution du rituel chrétien depuis les débuts de l'Église jusqu'à aujourd'hui. Il explique la dimension sociale de l'institution, montre que ce n'est pas seulement une affaire privée mais réellement un événement qui intéresse le monde dans lequel nous vivons. L'auteur soulève la difficulté de l'engagement et les problèmes éventuels qui peuvent surgir pendant la vie de couple. Le point central du développement reste tout de même le mariage comme sacrement. L'un des premiers livres à lire sur le sujet avant de s'attaquer à plus complexe.
Pourquoi se marier quand on vit ensemble ?
- Auteurs: Alain Quilici et Denis La Balme
- Résumé: Rédigé par un religieux ayant accompagné de nombreux couples au mariage et un professeur de philosophie, ce livre commence avec un dialogue entre eux sur la cohabitation, ses avantages et ses inconvénients. Puis après une explication du mariage comme sacrement, et pourquoi le demander, Alain Quilici montre qu'il n'est pas impossible de vivre un temps de fiançailles après avoir vécu ensemble. Les couples dans cette situation se retrouveront bien dans ce livre qui leur est principalement destiné. De plus ils doivent savoir qu'ils ont la possibilité de vivre leur préparation au mariage en vérité et peuvent trouver dans cet ouvrage une vision moins catégorique sur ce qu'ils vivent.
Les mirages de l'amour
- Auteur: Xavier Lacroix
- Résumé: Dans cet ouvrage Xavier Lacroix veut montrer que l'amour tant recherché dans notre société est souvent entaché d'illusions. En levant les mythes, les confusions de langages autour de l'amour, l'auteur cherche a prouver qu'aimer n'est pas aussi facile qu'il n'y paraît. Son propos tente de nous expliquer de quoi un amour véritable serait fait, ses différences et ses similitudes avec l'amitié pour terminer sur une amour-alliance à l'image de celle que Dieu a réalisé avec les Hommes. Permettant d'approcher l'amour sous un jour nouveau ce livre ne pourrait servir d'introduction au thème de l'amour et du mariage.
La sexualité selon Jean Paul II
- Auteur: Yves Semen
- Résumé: Durant de longues années, Jean-Paul II a élaboré sa "théologie du corps" discrètement disséminée dans les audiences générales du mercredi. Yves Semen simplifie et met l'important fruit de ce travail à notre portée. Parti de l'échec de l'encyclique controversée "Humanae Vitae", Jean-Paul II apporte une vision théologique et anthropologique nouvelle de la sexualité. Même si la conclusion reste identique, la réflexion de ce pape permet à chacun de mieux s'approprier les interdits concernant la contraception. Développé en 5 chapitres, ce livre commence par présenter l'histoire de ce travail de Karol Wojtyla puis suit les quatre parties de la cathéchèse du pape. Un ouvrage à lire après avoir déjà entrevu la perception de l'Église sur la sexualité, il pourra répondre à bien des interrogations de chacun.
Liens
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Xavier LACROIX, Les mirages de l'amour, Bayard Editions, Coll. Questions en débat ↩↩↩
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Claude BOUJON, Pauvre Verdurette, Ed. L'école des loisirs ↩
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Denis de ROUGEMONT cité par Xavier LACROIX in Les mirages de l'amour ↩
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Notamment Découvrons l'amour ↩
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JK Rowling, Harry Potter - Le prince de sang mêlé, Chap. Felix Felicis, Le professeur Slughorn met ses élèves en garde contre les effets pervers du philtre d'amour. ↩
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Tony ANATRELLA, Interminables adolescences, Ed. Cerf-Cujas ↩
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Alain QUILICI et Denis LA BALME, Pourquoi se marier quand on vit ensemble ?, Ed. Mame - Edifa ↩↩
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Jacques SALOME, Parle-moi, j'ai des choses à te dire, Editions de l'homme ↩
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Denis SONET, Découvrons l'amour, Ed. Droguet et Ardant ↩
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Cette durée a été augmentée fin 2005 pour passer de 2 à 4 ans ↩
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Yves SEMEN, La sexualité selon Jean-Paul II, Ed. Presse de la Renaissance ↩
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Article numéro 1210 du Cathéchisme de l'Eglise Catholique ↩
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extrait d'interview de Valérie Guignabodet sur le site du film Mariages! ↩
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Sondage TNS-Sofres, Pèlerin, no 6428, paru le 9 février 2006, p. 42 à 45. Ce sondage a été réalisé sur un échantillon national significatif de 1000 personnes de plus de 18 ans ↩